samedi 21 février 2009

Témoignage de Julian Gorkin

Témoigage de Julian Gorkin.

«Il existe maintenant un style et un jargon absolument propres au stalinisme. Les militants s’en sentent comme prisonniers, ils en sont presque intoxiqués. Ainsi, il s’est formé une façon de penser unilatérale, uniforme et mimétique soumise et crédule, dirigée et totalitaire qui a fini par annuler toute pensée propre.On a perdu la dignité personnelle au nom d’une dignité prétendue supérieure, la dignité du parti et on a fini par trahir, avec le plus grand naturel, tout ce qui paraissait sacré à l’homme : la famille, l’amitié, le pays où il est né, le peuple qui est le sien, et lui-même, pour ne pas trahir le Parti et son grand leader, l’Union Soviétique et son chef suprême et indiscutable. »

« Nous avons connu cette triste expérience, au cour de notre vie de militant et de la vie de nos compagnons de parti et nous pouvons en parler en toute connaissance de cause et en toute responsabilité. Ils sont si peu nombreux ceux qui ont eu ensuite l’occasion de faire l’autre expérience, celle de la désintoxication en face de la réalité soviétique vue de l’intérieur. Et si peu nombreux aussi ceux qui ont eu le courage de proclamer la reconquête de soi-même et de se déclarer en étât de révolte et de rompre avec la discipline mentale et organique du communisme. »

« Dans ce dernier cas, en dehors de la crainte de représailles qui s’exercent non seulement sur le plan économique mais sur la vie elle-même, beaucoup de militants ont peur d’affronter le mépris de ceux qui ont été leurs compagnons durant de longues années de vie commune et d’espérance, d’être accusés de trahison, de subir le vide politique et moral auquel ils seraient condamnés. Peuvent-ils facilement cesser d’être ce qu’ils ont été? Peuvent-ils rompre du jour au lendemain avec leur passé, reconnaître que tout ce qu’ils ont dit et fait pendant leur vie était inutile ey même contraire aux intérêts du peuple et de l’Humanité; se tourner vers ceux qu’ils combattaient hier comme des ennemis irréconciliables, pour reconnaître que ceux-ci avaient raison contre eux ? »

« Nombreux sont les hommes qui, bien qu’ayant compris la vérité, n’ont pas eu le courage de franchir le pas, par routine, par inertie, par couardise, par égoïsme; ils préférèrent continuer, en simulant la fidélité qu’ils ont cessé de ressentir, de servir une cause qu’ils savaient fausse et même criminelle et d’adorer un dieu qu’ils savaient d’argile vulgaire. »

Julian Gorkin, Destin du XXième Siècle, Coll, Spartacus.


"L'alternative pour moi était claire: soit je faisais part de mes doutes et j'étais alors immédiatement exclue; je devenais un traître défendant des traîtres. Soit je me taisais. C'est cette solution que j'ai choisie.
Il faut comprendre que les communistes représentaient, en France, une véritable contre-société, avec son université, son école de cadres, ses fêtes, et une formidable fraternité. C'était tout ça que je devais quitter. Il aurait fallu que je me désolidarise des grèves, des mineurs qui étaient mes héros. C'était enfin rompre avec tous mes amis: si quelqu'un était exclu du Parti, il n'existait plus pour les autres, au point qu'on traversait la rue pour ne pas lui dire bonjour. Je revenais donc au Parti «comme un chien revient à son vomissement». C'est une expression communiste typique! " Pourquoi j'ai été stalinienne, Dominique Desanti

vendredi 20 février 2009

Revel, Gorkin,Lénine, Yartchouk, Sartre

« La solution d’une « économie sans profit », gérée exclusivement par la « puissance publique », cette solution, lorsqu’elle est appliquée à l’intégralité ou à la majeure partie de la production et de la distribution, brise les principaux moteurs de la vie économique, anéantit la productivité, la création., l’efficacité et les sources mêmes du bien-être. C’est du moins ce que l’expérience a permis de constater jusqu’à présent. Ainsi, la contradiction interne du socialisme est qu’il détruit les conditions mêmes de sa propre réalisation, en commençant par jeter les bases d’une société de pénurie »
J.F. Revel


« La liberté des échanges, écrit Lénine, c’est la liberté du commerce…. Or la liberté du commerce c’est le retour du capitalisme,… c’est l’échange entre des petits patrons. »
Ainsi, le paysan qui pousse l’araire auquel est attelé sa vache ou sa femme, cet ouvrier qui se livre à quelque minuscule trafic, c’est un patron. Il y avait à Moscou, sur la place Soukharevska une sorte de souk où s’effectuait de misérables échanges. Il fut fermé. «Mais, écrit Lénine, il n’était pas difficile de fermer l’ancien marché noir. Le plus terrible, c’est le Soukharevska qui règne dans l’âme et dans les actes de tout petit propriétaire. Voilà ce qu’il faut fermer. »

Lénine, Vll ieme Congrès des Soviets en Russie, p. 522

Rêvons avec Lénine

« Enregistrement et contôle, tel est l’essentiel, et pour la mise en route et pour le fonctionnement régulier de la société communiste dans sa première phase. Ici, tous les citoyens se transforment en employés salariés de l’Étât constitué par les citoyens armés. Tous les citoyens deviennent les employés d’un seul cartel du peuple tout entier, de l’Étât. Le tout est d’obtenir qu’ils fournissent un effort égal, observent exactement la mesure du travail et reçoivent in salaire égal…..la société toute entière ne sera plus qu’un seul bureau et un seul atelier avec égalité du travail et égalité du salaire. »



« L’enregistrement et le contôle » ont déjà été « simplifiés à l’extrême » par le capitalisme et sous le communisme, ils se réduiront « aux opérations les plus simples de surveillance et d’inscription et à la délivrance de reçus correspondants, toutes choses à la portée de quiconque sait lire, écrire et connaît les quatre règles de l’arithmétique. »


Lénine, 1975, T. lll, p.366 (A. Besançon, Les Origines intellectuelles du léninisme.

" Et ainsi, d'année en année, l'idée socialiste gagna du terrain, sans que personne eût pensé à examiner à fond ses conditions. Si bien qu'il arriva un jour où le socialisme marxiste, ayant pris le pouvoir, se mit en devoir d'exécuter intégralement son programme et dut reconnaître alors qu'il n'avait pas la moindre notion de ce vers quoi ses efforts avaient tendu pendant des dizaines et des dizaines d'années."

Ludwig von Mises, Etudes économiques et sociologiques, 1938

Ce qu'en dit Julian Gorkin:

« Comment eut-il pu penser (Lénine) qu’une Russie à demi barbare, à peine sortie du féodalisme put se mettre à la tête de l’émancipation et de la liberté du genre humain?….L’étât arriéré de l’URSS joint aux prétentions du bolchévisme au monopole ou à l’universalité, a donné naissance, avec le stalinisme, au pire des monstres : le nationalisme totalitaire russe et l’expansionnisme impérialiste retardataire et agressif, conséquence naturelle de ce nationalisme. »

Julian Gorkin, Destin du XXième siècle.

« C’est un capitalisme d’Étât, propriétaire des moyens de production et d’échange en même temps que des individus en tant que producteurs, consommateurs et « citoyens » de sorte que ceux-ci ne jouissent d’aucun droit ni d’aucune liberté. Les masses immenses constituant la population laborieuse peuvent être divisées en trois : les hommes à demi-esclaves qui ont encore la possibilité de travailler, moyennant salaire dans une usine, de marcher dans la rue, de dormir entassés dans une pièce ou un collectif, les esclaves des camps de travail forcés qui reçoivent la ration alimentaire correspondant strictement à la norme de travail qu’ils ont fournie, les serfs des kolkhozes. Quoi qu’en disent les textes officiels soviétiques, ces masses ne jouissent d’aucun droit civiques, juridiques, politiques,social et moral. Leur seule raison d’être sont le travail et l’exploitation. »

Julian Gorkin, Destin.

C’est à cette société idéale que tant d’intellectuels français, dont Jean-Paul Sartre rêvaient. C’est aussi Sartre qui a déploré que la réalité monstrueuse des camps de concentrations comptant des millions de prisonniers-esclaves ait été dévoilé publiquement dans le rapport Khroutchev.

Et c’est Simone de Beauvoir qui disait : , "C'était vraiment des centres de
rééducation, un travail modéré, dira-t-elle en 1963, un régime libéral, des théâtres, des bibliothèques, des causeries, des relations familières, presque amicales, entre les responsables et les détenus »

Ces deux intellectuels ne savaient pas ? Ils auraient dû écouter l’anarchiste Efim Yartchouk qui dévoilait tout dès 1922. Yartchouk était un acteur et un témoins visuel. Il avait pris part à la révolte de Kronstadt :

« En réalisant la révolution d’Octobre, la classe ouvrière espérait atteindre son émancipation complète. En résultat, une exploitation encore plus grande s’est crée contre la personne des travailleurs. Le pouvoir gendarmo-policier du monarchisme est passé dans les mains des usurpateurs communistes, lesquels ont apporté aux travailleurs, au lieu de la liberté, la crainte continuelle de la Tchéka, dépassant en horreur le régime policier tsariste. Les baillonnettes, les balles et les rebuffades grossières du tchékiste, voilà ce qu’après une lutte si longue et si meurtrière a gagné le travailleur de la Russie soviétique…. »

« Mais, ce qui est le plus ignoble et le plus criminel c’est l’asservissement moral qu’ils ont imposé; ils ont pris possession du monde intérieur des tavailleurs, les obligeant à penser seulement de la manière qu’il leur convient.
Ils ont enchaîné les ouvriers aux ateliers à l’aide des syndicats officiels transformant le travail non en joie mais en nouvel esclavage. Aux protestations des paysans s’exprimant en des soulèvement spontannés et à celles des ouvriers obligés d’en recourir, par la force même des choses, à la grève, ils répondent par des fusillades en masse et une férocité égale à celle des généraux tsaristes. »

« ….cela est devenu évident, que le Parti communiste russe (les Bolchéviques) n’est pas le défenseur des travailleurs ainsi qu’il se présente car les intérêtes du peuple laborieux lui sont étrangers. Ayant conquis le pouvoir, il craint de le perdre, c’est pourquoi tous les moyens sont permis pour le conserver : la calomnie, la violence, la tromperie, le meurtre, les représailles contre les familles des insurgés. » Éfim Yartchouk

Sartre accusait les Yarkchouk, Buber-Newman, Kravchenko, Rousset, Soljénitsyne, d’être à la solde de la CIA et quand il s’est ouvert les yeux à la publication du Rapport Khroutchev, il a déploré que ce soit rendu public car cela risquait de « démoraliser Billancourt. » C’est tout dire !

Si on se fie à Lénine, Yartchouk ne connaissait rien du prolétariat et de ce qui est bien pour lui car :

« Seul le parti connaît la vérité – le marxisme – sur le vrai – le prolétariat : le prolétariat reçoit sa vérité du parti. Prétendre dire la vérité du prolétariat au nom du prolétariat, reçoit sa vérité du parti. Prétendre être son porte-parole, signe le mensonge qui pourra être dénoncé au nom du prolétariat par le parti, qui seul connaît la vérité du prolétariat. Les énoncés sur le prolétariat ne sont vrais que si le sujet de l’énonciation n’est pas le prolétaire mais le parti : vouloir faire coincider le sujet de l’énoncé- le prolétariat- avec le sujet de l’énonciation- le prolétariat- voilà une imposture anti-parti. »

Lénine, Œuvre Complète, tome 15, p. 475

Voilà un bel exemple de quelqu’un dont le cerveau a été possédé par l’Idée. L’Idée a remplacé la réalité. Les mots ont pris la place des choses réelles. Et cette hallucination a été la cause de la mort de millions d’êtres humains vivants et sentants qui n’avaient qu’une seule vie. Des millions d’hommes, de femmes et d’enfant sont morts de faim, des centaines de millers ont été fusillés, assassinés, déportés pour le règne de l’Idée, à cause d’un homme médiocre et psychologiquement et intellectuellement dérangé.

Et il se trouve des gens assez irréfléchis ou profondément ignorants, et au cœur et à l’intelligence assez tordues, pour dire qu’un tel homme a libéré le peuple russe du despotisme, de l’ignorance, de la « misère », en tous cas, de celle qu’ils veulent bien imaginer et que, puisqu'il n'y avait aucune autre façon de le faire, ses crimes ne furent pas des crimes mais une "nécessité historique."

Lénine, à l’âge de seize ans, fut « illuminé » par le roman de Tchernitchevski, Que faire. L'utopie s'est emparé de son cerveau sans qu'il la mette le moindrement en question, sans aucun esprit critique, sans la maturité intellectuelle nécessaire pour pouvoir bien juger, sans aucune culture, même générale, sans expérience pratique de la vie. Comme beaucoup de jeunes.

Voici un beau texte de Tourguéniev, à ce sujet :

« Vous qui désirez ce seuil, savez-vous ce qui vous attend?
Je le sais répondit la jeune fille.
Le froid, la faim, le dégoût, la dérision, le mépris, les abus, la prison, la maladie et la mort !
Je le sais, je suis prête, je supporterai tous les coups.
Pas seulement des ennemis, mais aussi des parents et d’amis.
Oui, même d’eux…
Est-ce que vous êtes prête à commettre même un crime ?
Je suis prête pour le crime, aussi.
Savez-vous que vous pouvez être désillusionnée par vos croyances, que vous pouvez découvrir que vous vous êtes trompée, que vous avez ruiné votre jeune vie en vain ?
Je le sais aussi.
Entrez !
La jeune fille passe le seuil et un lourd rideau s’abat derrière elle.
Une imbécile ! dit quelqu’un en grinçant des dents.
Une sainte !fait quelqu’un d’autre, en réponse. »

"Saint Lénine" ont longtemps proclamé certains. "Saint Lénine" procament encore cetrtains.

« En tous cas, ressentir une admiration sans borne, ou presque, pour une telle position revient certainement à s’en faire le complice. » Robert Conquest.








Dans ce discours hallucinant digne d'un aliéné, où se trouvent les personnes en chair et en os, où sont les hommes, les femmes. les enfants réels ? Ils n'existent pas et n'ont jamais existé , pour ce gens-là. Ils étaient totalement absents de leur préoccupation. Lénine et tous ses semblables vivaient dans un autre monde, un monde abstrait, fantasmagorique. Ils vivaient dans des "hallucinations conceptuelles."











Raymond Aron: quelques citations.

« La planète n’appartiendra pas aux Européens, parfois nous inclinons à croire qu’elle appartiendra aux Russes ou aux Américains; le plus souvent, instruits par l’expérience, nous nous consolons à la pensée qu’elle n’appartiendra, pour longtemps, à personne »
Raymond Aron, 1956..

« Le culte de la liberté compromet la liberté authentique. »


« Au reste, je me débarrassai assez vite de la superstition que Sartre défendit jusqu’à son dernier souffle : « la droite, ce sont des salauds », ou dans un langage plus académique, de la superstition que les partis diffèrent par la qualité morale ou humaine de leurs militants ou de leurs chefs. Probablement, les partis de la gauche recrutent-ils davantage parmi les idéalistes (au sens banal du mot). Quand les révolutionnaires passent de l’autre côté de la barrière, conservent-ils longtemps leur supériorité morale? Il se trouve des vertueux dans chaque camp. Sont-ils nombreux dans aucun? »

« Le pacifisme est inspiré par l’humanitarisme et ce que l’on a appelé le moralisme, c’est à dire, la tendance à juger des problèmes sociaux et hsitoriques en fonction des règles morales que l’on enseigne aux individus…Un tel pacifisme n’a rien à voir avec la politique, il est d’ordre moral. Il n’est pas une doctrine, il est une foi. »
R. Aron.

« Qui combat pour l’absolu a-t-il besoin d’économiser les cadavres.? …D’autant plus le bien que l’on espère, d’autant plus le mal qu’on s’autorise. Or, le bien est sans limites et c’est ce qui ouvre les portes toutes grandes à l’horreur….Qui combat contre un mal ( et non pour un bien, pour un meilleur, pour un absolu, un idéal) au contraire ne saurait pour le combattre, s’autoriser plus de mal que celui qu’il affronte…..Au lieu de faire le mal au nom du bien, le pire au nom du meilleur, comme tant de fanatiques, faisons plutôt un peu de bien contre le mal et le moins de mal contre le pire. » R. Aron.

« Qui a répandu un enseignement mortifère, ceux qui cherchèrent La Mecque tour à tour à Moscou, Belgrade, Pékin, La Havane ou ceux qui, libérés des croyances sotériologiques, travaillèrent de leur mieux à la prospérité, aux réformes des régimes libéraux, les moins mauvais de notre civilisation, peut-être les moins mauvais de l’Histoire ? »
R. Aron

Aube nouvelle

« Nous rejetons les vieux systèmes de moralité et d’humanité inventés par la bougeoisie dans le but d’opprimer et d’exploiter les « classes inférieures ». Notre moralité n’a pas de précédent, notre humanité est absolue car elle repose sur un nouvel idéal : détruire toute forme d’oppression et de violence. Pour nous, tout est pemis car nous sommes les premiers au monde à lever l’épée, non pas pour opprimer et réduire en esclavage mais pour libérer l’humanité de ses chaînes. »
Le Glaive Rouge, Journal de la Tchéka de Kiev 1919

Méthode pour libérer l'Humanité ?

"Jai compris l'importance de la terreur corporelle que l'individu a de la masse. Ici, encore, juste psychologie! La terreur sur le chantier, à l'usine, aux lieux de réunion et à l'occasion des meetings, aura toujours un plein succès tant qu'une terreur égale ne lui barrera pas la route...Nous devions faire comprendre au marxisme que le national-socialisme était le maître futur de la rue et qu'il serait un jour, maître de l'Étât."
Hitler.

jeudi 19 février 2009

Photos
















Pierre Bayle

« Hormis la grâce du Saint-Esprit, nous n’avons qu’un maître, l’amour-propre. »


« Pour un Chrétien qui aime mieux obéir aux hommes qu’à Dieu, les sermons les plus pathétiques qui ouvrent le plus sensiblement les enfers aux blasphémateurs ont bien moins de force que la menace d’une amende. » (Avec les hommes il faut payer comptant alors qu’avec Dieu….)


« Voulez-vous qu’une nation soit assez forte pour résister à ses voisins ? laissez les maximes du christianisme pour thèmes aux prédicateurs : conservez cela pour la théorie et ramenez la pratique sous les lois de la nature qui permet de rendre coup pour coup et qui nous excite à nous élever au dessus de notre étât, à devenir plus riches et de meilleure condition que nos pères. Conservez à l’avarice et à l’ambition toute leur vivacité……que rien ne puisse arrêter la passion de s’enrichir. »
(C’est une vérité objective mais pas nécessairement le choix de Bayle.)

« C’est une illusion toute pure que de prétendre qu’un sentiment qui passe de siècle en siècle et de génération en génération ne peut être entièrement faux…..cela suffit pour rendre ces opinions éternelles parce qu’à la réserve de quelques esprits philosophes, personne ne s’avise d’examiner si ce que l’on entend dire partout est illusoire. Chacun suppose qu’on l’a examiné autrefois et que les anciens ont assez pris les devants contre l’erreur; et là-dessus c’est à l’enseigner à son tour à la postérité comme une chose infaillible. »

mercredi 18 février 2009

Militant

Réflections de Manès Sperber sur sa vie de militant communiste.

« ….D’autres voulaient éliminer définitivement les ordres et les classes pour mettre un terme à la domination d’une catégorie sociale sur les autres. Pour la première fois, croyait-on, il était possible d’instaurer une communauté fraternelle de tous les hommes : on pourrait alors mettre les peuples à l’abri du pillage et de l’humiliation.

« J’appartiens moi-même à cette génération. Ils sont encore dans ma mémoire, intacts, cet appel qu’on nous avait lancé à tous, ce rêve d’une aube éternelle. Comme tant de mes pareils, j’ai moi aussi décrit nos espoirs, l’inconcevable démesure de nos certitudes. J’ai raconté comment était survenu ce profond traumatisme devenu inévitable, comment s’était ouvert ce clivage entre les promesses et leur accomplissement, comment nos objectifs avaient été écrasés par des moyens censés aider à les atteindre, mais qui, dans la réalité, transformaient toute chose en son contraire. »

« ….ils sont (mes compagnons) devenus les coupables victimes d’une tragédie aux allures de parodie. Ces révolutionnaires qui voulaient abolir une fois pour toutes de la surface de la terre toute espèce de contrainte menant à une soumission et à une adaptation inconditionnelle, acceptèrent pourtant de renoncer à leur propre pensée critique et de se soumettre entièrement à une direction qu’ils n’avaient pas du tout choisie eux-mêmes. »

Il n’existe qu’une seule porte pour quitter la Révolution. Elle ouvre sur le néant. Je me l’étais souvent représentée et cette idée m’emplissait d’angoisse. »

Un régime capable d’obtenir un tel résultat, et de le présenter au monde entier comme un triomphe de l’amour, de la paix et de l’humanisme socialiste – dans la liesse commandée de l’ensemble de la population bruyante de tous les communistes et de leurs sympathisants- un tel régime se révélait ainsi comme un modèle de totalitarisme. Dans le dialecte organique de mes douleurs cardiaques, s’exprimaient l’insupportable tourment, la honte infinie que m’inspirait le fait de m’être engagé en faveur d’un tel pouvoir, d’avoir gagné des partisans à sa cause, d’avoir tant négligé de choses pour lui. La chute m’emporta au plus profond de l’abyme. »

« Ceux qui attendent des miracles au lieu d’améliorer eux-mêmes leur existence portent au pouvoir des faiseurs de miracles qui se transforment assez rapidement en tyrans. »


« La tyrannie, ce n’est pas seulement le tyran, ce n’est pas lui seul avec ses complices, mais aussi les sujets, ses victimes qui en ont fait un tyran. »

« Sans la certitude et sans le courage d’être celui que l’on est, on n’est pas libre et on supporte difficilement que d’autres le soient. »

« L’aliénation non surmontée de soi-même lui donne envie de croire ces escrocs qui lui promettent d’abolir définitivement toute aliénation, toutes les limites de la liberté, toute l’injustice. »

« La liberté n’existe pas en dehors de ces relations qui la rendent possible, au sein desquelles on peut la conquérir et la perdre. Cela signifie que pour pouvoir parler de l’homme libre il faut qu’il existe une collectivité. L’homme devient libre contre la nature mais il n’est à la fois libre et lié que dans son rapport à la communauté.
Demeurer libre dans le lien et se lier à partir d’une liberté souveraine, ce sont des comportement caractéristiques de l’homme devenu libre. »

« Hormis là où manque le minimum vital, l’esitmation de soi a lieu sur la base d’une comparaison entre ce que l’on a et ce que d’autres n’ont pas, et plus encore, entre ce que d’autres ont et ce que l’on a pas soi-même. »

Manès Sperber.